Ce qu’ils ont fait. La journée qu’ils ont passé ensemble. Elle, cuisinant, lui adossé au comptoir à la regarder en souriant, en venant picorer ses lèvres parfois, en se retrouvant dans un angle mort. Déjeuner avec elle, apprécier le moment. Retourner dans le bureau pour s’embrasser encore, rester sur le canapé, elle sur ses genoux à se câliner, s’apprendre. Comparer MoonBin au Grinch dans ses mauvais jours. Saliver de plaisir sur les assiettes de Nana. Imaginer Noël. Imaginer ce qu’ils feront en Angleterre et se rendre compte comme ça fait du bien tout ça. Il n’a jamais autant aimé être avec quelqu’un. Ça n’a jamais été autant facile. Aussi tendre. Aussi complice. Pourquoi est-ce que ça a fait les choses ainsi hn ?

D’un commun accord, ils se sont accordés pour dire qu’ils iront séparés à la soirée. Lui en premier, puis elle. Ah, la laisser dans cette maison a été un déchirement. Tout ce qu’il espère, c’est pouvoir passer la nuit avec elle. Peut-être lui proposera-t-il d’aller dans son sanctuaire. Cet endroit qu’il n’a jamais montré à personne non plus. Ils y seront bien. Pas de caméras, aucune peur à avoir. Peut-être qu’elle dira oui.

Déjà une heure qu’il joue les étudiants modèles. Il n’aime vraiment pas ce genre de soirée, surtout qu’aux yeux des autres, il n’est qu’un enfoiré privilégié avec ses années à l’étranger, sans compte qu’il est le seul qui n’a pas à planifier son service militaire de tous les coréens présents. Et certains le savent. Ils ignorent juste la raison. La popularité de Hanbin auprès de la gente féminine n’aide pas non plus à ce que ses pairs l’apprécient lorsqu’il y pense.

Enfin, elle entre dans la pièce, son souffle se coupe un peu. Il la regarde, lèche discrètement ses lèvres, puis, il vient à sa rencontre en lui proposant un verre. « Bonsoir Professeur, bienvenue ! » Oh, comme il la dévore du regard. Il se reprend, sourit longuement. Vous avez un buffet sur votre gauche, le bar est au fond. »

Les quelques heures sans lui paraissent cruellement longues. Elle repense à ses doigts sur sa peau, à ses lèvres contre les siennes, à sa voix qui fait vibrer son coeur. Mais elle n’a guère le temps de lésiner. Elle a beaucoup de choses à ranger et à nettoyer, dont les bandes de la caméra de surveillance. Elle se surprend à rougir lorsqu’elle se voit l’attirer à l’intérieur, lorsqu’elle se voit le prendre dans ses bras comme s’ils ne s’étaient pas vus depuis des années. Elle efface presque à contre coeur cette séquence, et puis toutes les autres, leur chemin vers la salle de bain, celui vers la cuisine. Elle réalise que si elle regardait les enregistrements avec Moon Bin, elle ne verra que deux êtres éloignés qui ne se regardent même plus.

Perturbée par sa prise de conscience auprès de Hanbin, subjuguée par ce dernier, elle se somme d’agir en fonction de ses sentiments. Et par respect pour lui, il lui faudra divorcer avec son frère. Mais les choses sont ce qu’elles sont en Corée, c’est un acte délicat et ils risqueraient d’y perdre beaucoup, tous les deux. Alors pour le moment, il est plus sage de mentir. Et pour l’instant, Louise ne songe qu’à retrouver son bel amant. Qu’est-ce qu’une tenue sage pour une professeure ? Elle enfile un costume, un pantalon et une veste ceintrée sous laquelle une chemise blanche non décolletée se détache. Elle sera assortie à Han Bin en terme de couleurs, les carreaux en moins.

Son entrée est remarquée. En tant que professeure étrangère, elle a autant de succès que son collègue, le célèbre Monsieur B. Ce dernier la salue d’ailleurs et elle lui offre un charmant sourire. Lou rayonne. Elle est charmante avec tout le monde, mais son regard cherche son promis. Non loin de là, elle finit par capter son regard. Ses prunelles semblent la caresser de la manière la plus tentante qu’il soit. Elle ne peut s’empêcher de rougir. Elle lui lance un regard de reproche lorsqu’il ose se lécher les lèvres de manière suggestive. Elle se serait bien jetée sur lui. Mais elle doit se retenir, rester sage et convenable.

Elle le laisse s’approcher de lui, son sourire essaie de rester neutre, mais ses yeux brillent malicieusement, lui disent à quel point elle est heureuse de le voir. « Merci Han Bin, belle soirée n’est-ce pas ? » Elle en profite pour effleurer ses doigts lorsqu’elle s’empare du verre qu’il lui tend. « Je me laisserais bien tenter par le buffet, y a-t-il des mets végétariens ? » Elle a envie de rire, c’est si difficile de rester sérieuse alors qu’elle lui parle de manière si soutenue. D’un petit coup d’oeil complice, elle lui indique un endroit un peu à l’écart et une fois qu’elle est sûre que personne ne peut les entendre, elle murmure. « J’ai lu un peu ton mémoire en attendant de pouvoir venir. » Et que ça avait été difficile d’attendre ! « C’est très captivant, même pour quelqu’un qui n’y connaît rien, comme moi. Je me disais que...tu pourrais peut-être m’en faire la lecture toi-même… » Elle lève un regard de biche vers lui, les imagine déjà entre les draps, lui avec ses lunettes sur le nez, elle écoutant sagement en baladant ses doigts sur sa peau, jusqu’à ce qu’elle blêmisse presque.

« Oh Hans ! Bonsoir ! Comment vas-tu ? » Le fameux Monsieur B était venu s’inviter dans leur petit groupe. « Chère Louise ! Toujours aussi pimpante ! Vous connaissez mon meilleur élève ? » « Oui, il est...de la famille. » Elle n’a pas envie de dire “le petit frère de mon mari”, cela lui écorcherait la bouche. « De la famille ? Oh ! Je vois. » Il se tourne vers Han Bin. « Comment avance-votre mémoire ? »

« Merci Han Bin, belle soirée n’est-ce pas ? » Il sourit et joint ses mains dans son dos. « Hn, les gens semblent ravis et avec les grandes tentes, il ne fait pas froid et nous pouvons profiter de la vue sur le parc et l’université, c’est agréable. » Indéniablement, et ça le fait rire intérieurement de jouer à ce petit jeu avec elle, malgré les sourires complices qui s’échappent parfois. « Je me laisserais bien tenter par le buffet, y a-t-il des mets végétariens ? » « Hn, j’ai personnellement veillé à ce qu’on puisse en trouver ! » Après tout, il faisait parti des élèves organisateurs. Lorsqu’elle lui fait signe, discrètement, de fuir avec elle dans un endroit plus calme, il ne se fait pas prier et la rejoint rapidement, dans un sourire. Il doit cependant se retenir de la toucher, l’embrasser. Cette torture horrible. Infâme même.  « J’ai lu un peu ton mémoire en attendant de pouvoir venir. » « Alors ? » Demande-t-il, le coeur un peu fébrile. « C’est très captivant, même pour quelqu’un qui n’y connaît rien, comme moi. Je me disais que...tu pourrais peut-être m’en faire la lecture toi-même… » « Vraiment ? » Il sourit, soulagé et heureux. « Hn, si ça te fait plaisir, ça me fait plaisir... » Il allait se rapprocher un peu d’aller, mais s’arrête lorsque Mr B. arrive vers eux.

« Oh Hans ! Bonsoir ! Comment vas-tu ? » Il le salue poliment en s’inclinant un peu. « Chère Louise ! Toujours aussi pimpante ! Vous connaissez mon meilleur élève ? » « Oui, il est...de la famille. » Merf, ce titre lui fait mal à l’égo et l’amour. Si seulement, c’était plus simple. Un étudiant qui tombe amoureux de sa prof, non ? Sans lien de famille... « De la famille ? Oh ! Je vois. » Hanie lui offre un beau sourire. « Comment avance-votre mémoire ? » « Merveilleusement bien Monsieur, Noona a bien voulu commencer à le relire... » dit-il en montrant Louise. « Par contre... » Son sourire se fane et sa joie s’estompe. « Je sais que vous m’aviez chaudement recommandé auprès d’un architecte qui m’aurait énormément apporté, mais... » Rah, ça le tue… Sa mère lui a redit ce matin qu’il irait à Busan, que ça serait très bien. « Mes parents m’ont trouvé un autre stage à Busan… Ils pensent que c’est mieux là-bas. » Ils pensent. Il insistent bien sur ce ILS. Pas lui. Lui, il se sent mal. Il avait déjà rencontré son futur patron. « Je suis désolé, je ne pensais pas qu’ils s’intéresseraient à mes études à ce point... » Son regard se pose aussi sur Lou. Etre si loin d’elle durant quatre mois.

Amusée de leur échange, elle trouve ça presque trop facile. Malgré tout elle essaie de faire attention, car n'importe qui de très observateur ne douterait pas un instant qu'il y a entre eux bien plus qu'un simple lien filial. Comme toujours Hanbin est prévenant. Lou apprécie cette qualité du jeune homme, car à ses côtés, elle a enfin l'impression d'exister, et exister autrement qu'en faire-valoir. C'est ce qu'elle a compris en vivant auprès de Moon Bin. Elle n'est pour lui qu'une vitrine exotique de mariage parfait. Avec Hannie, elle est un être humain. Et ça, ça fait toute la différence. Elle apprécie de le voir touché par ses petits compliments à propos de son mémoire. « Je ne fais que dire la vérité ! » mentionne-t-elle avec un sourire tendre. Il est si adorable encore une fois. Elle aimerait qu'il pense à lui de temps en temps. Il est vraiment du genre à se couper en quatre pour les autres.

Elle l'a vite compris, et plus encore après quelques phrases échangées avec son collègue. D'un regard désolé adressé à Lou, Han Bin explique que ses parents ont eu raison de sa décision de faire son stage à Séoul. Busan ce sera. Le visage de Louise se décompose un instant, avant qu'elle ne retrouve un sourire crispé. Alors sa chère belle-mère aura eu le dernier mot. Elle ne dit rien à ce sujet, observant tour à tour Hanbin et son professeur. Ce dernier a l'air presque aussi déçu que les deux autres. « Aaah..c'est bien embêtant, Monsieur Nam se faisait une joie de vous recevoir....l'avez-vous déjà prévenu ? » Hans sait aussi bien que Lou, même s'il est tout aussi choqué, à quel point la décision des parents importe, même pour des personnes majeures. « Les parents ont toujours le dernier mot n'est-ce pas ? » Il fait un petit sourire compatissant, tapote l'épaule de Hanbin avant d'annoncer. « Bon et bien, je vous laisse profiter de la soirée, j'ai mon fan club à satisfaire ! » Lou recouvre sa bouche de sa main libre pour pouffer. « Ton fan club ? » Il fait un grand sourire charmeur « Mais oui, toutes ces étudiantes qui veulent que je leur parle finlandais même si elles n'y comprennent rien ! »

Lou éclate de rire avant de chercher le regard de Han Bin. Peut-être un peu trop amoureusement. Cela n'échappe pas à Hans qui vient se pencher à son oreille pour que l'étudiant n'entende pas. « Fais attention. Tu es trop expressive. » Lou pique un fard. La gêne s'empare d'elle et elle adresse un regard presque paniqué à Hans. Il lui sourit. Il ne dira rien. Elle soupire de soulagement en le regardant partir. Finalement, elle se tourne vers Han Bin, les yeux baissé sur son verre, sans oser le regarder. « Les gens ne vont pas trouver ça étrange que tu restes avec une prof ? Tu...n'as pas quelques amis à rejoindre ? » Elle relève les yeux vers lui, une moue indécise sur le visage. Elle aimerait rester collée à lui, mais, elle ne voudrait surtout pas mettre à mal sa réputation.

« Aaah..c'est bien embêtant, Monsieur Nam se faisait une joie de vous recevoir....l'avez-vous déjà prévenu ? » « Non, je voulais d’abord vous en parler pour que vous ne soyez par surpris s’il vous contacte… Je suis vraiment désolé Monsieur, » dit-il en s’inclinant poliment. Vraiment, ça lui fend le coeur de ne pas avoir eu le dernier mot pour ça. « Les parents ont toujours le dernier mot n'est-ce pas ? » Baissant la tête, il regarde ailleurs le temps de se canaliser avant de les regarder à nouveau dans un petit sourire de circonstance, mais vide de sens. « Bon et bien, je vous laisse profiter de la soirée, j'ai mon fan club à satisfaire ! » Hanie sourit un peu plus cette fois. « Ton fan club ? » « Mais oui, toutes ces étudiantes qui veulent que je leur parle finlandais même si elles n'y comprennent rien ! » Un petit rire lui échappe et il croise ses bras en observant son professeur, c’est vrai qu’il a du succès pour ça. Lui aussi, on lui demande parfois de parler en français lorsqu’on sait qu’il l’a appris.

Il regarde son professeur se pencher à l’oreille de Lou, et cette dernière devenir complètement rouge, lui faisait hausser un sourcil. Il les regarde un peu, avant de juste boire un peu son jus de fruits. « Les gens ne vont pas trouver ça étrange que tu restes avec une prof ? Tu...n'as pas quelques amis à rejoindre ? » Il lui offre un sourire tendre lorsqu’elle ose le regarder à nouveau. « Ani, je n’ai pas beaucoup d’amis. Quand on est populaire, on est pas vraiment approché. » Ses épaules se haussent. Il n’aime pas se vanter pour sa popularité. C’est un fait. On le prend pour un chieur parce qu’il n’a pas vraiment eu de copines, il semble difficile. Les mecs le voient comme un rival, les filles, comme le but à atteindre mais qui ne veut de personne. Il passe pour un snob.

« Et c’est plus agréable de parler avec toi, j’ai l’habitude de parler avec mes professeurs en réalité. » Il lui sourit un peu et se penche vers elle doucement. « Et on pourrait s’éclipser discrètement dans pas longtemps pour faire notre after dans notre QG ou ailleurs si ça te dit... » qu’il murmure tout bas à son oreille dans un demi sourire.

L’échange entre Han Bin et Monsieur B se poursuit à demi-mots, des sous-entendus placés en faveur d’une compréhension mutuelle de la situation. Hannie semble plus secoué qu’il ne veut le laisser paraître. Les décisions de sa vie lui filent entre les doigts et une nouvelle personne vient de le lui faire remarquer. Lou attends sagement que Hans soit parti pour relancer la conversation avec son beau brun. La professeure et l’étudiant ne font rien de mal, mais la culpabilité la ronge. Elle a peur, peur que tout se sache, surtout quand son collègue lui glisse aussi directement qu’il sait.

Han Bin lance avec tant de simplicité que son statut de garçon populaire l’éloigne de potentielles relations amicales, si bien qu’au lieu de répondre au sourire de ce dernier, elle arque les sourcils avec tristesse. « Et ça ne te manque pas ? » Louise avait grandit bien entourée, les amis, elle en avait, enfin, peu sont restés dans ses contacts, mais elle n’a jamais connu la solitude, et pourtant elle faisait partie des ados populaires. Simplement, en Europe, les gens osent vous approcher, il n’y a ensuite qu’à faire attention à qui l’on accorde sa confiance.

Il poursuit en glissant à Lou qu’il préfère parler avec elle. Cette fois un petit sourire tendre se dessine sur ses lèvres. « Vil flatteur. » Mais elle est sincèrement touchée par ses paroles. On peut le deviner à ses joues qui se sont colorées de rose. La suite annoncée lui fait briller les prunelles. Elle a soudain un regard intéressé. « Ah oui ? Tu as une idée d’où aller ? » Elle a une moue indécise en regardant vers un groupe de professeurs, avant de dire à voix basse.. « Il faut qu’on parte à des moments différents et dans des directions différentes je suppose... » Elle relève ses yeux vers Han Bin. « Il faut quand même que j’aille discuter un tout petit peu avec mes supérieurs… on se retrouve dans une demi-heure au troisième banc de l’allée qui mène à la ville ? Juste à l’extérieur de l’enceinte. » Ses doigts caressent son verre comme elle aimerait caresser les doigts de Han Bin.

« Et ça ne te manque pas ? » Ses épaules se haussent doucement. « Mes amis de là-bas oui, ici pas vraiment... » Là-bas, Edimbourg, Paris, NYC. Là, oui, il s’était fait des vrais amis. Des gens qui n’ont jamais vraiment regardé sa richesse ou le fait qu’il semblait privilégié. Mais ici, non pas trop. C’est pour ça aussi qu’il a hâte de repartir. Sacrément hâte. Surtout depuis le coup pour son stage. Il doit bien avouer que ça a creusé un peu plus l’écart avec sa famille.

Et puis, il est bien là, à discuter avec elle, elle est bien plus intéressante que beaucoup de monde ici. Excepté Mister B. Personne ne peut battre Mister B. « Vil flatteur. » Il sourit en coin lorsqu’elle lui dit cela. Enchaînant alors rapidement sur une proposition alléchante. Il a vraiment envie de passer du temps avec elle plus qu’ici. On ira pas rapporter à sa mère qu’il est parti rapidement de la soirée non ? Ça devrait aller. « Ah oui ? Tu as une idée d’où aller ? » « Peut-être. » Comme retourner dans ce petit bistro qu’ils ont tant aimé la dernière fois, ou se promener le long de la rivière Han ? Est-ce qu’il l’emmène dans son nid ? Ce coin que personne ne connaît de lui ? « Il faut qu’on parte à des moments différents et dans des directions différentes je suppose... » Hochant doucement sa tête, il regarde autour d’eux, se rapproche un peu pour lui caresser discrètement la hanche avant de se remettre droit. « Il faut quand même que j’aille discuter un tout petit peu avec mes supérieurs… on se retrouve dans une demi-heure au troisième banc de l’allée qui mène à la ville ? Juste à l’extérieur de l’enceinte. » « D’acc ! » Qu’il lance en lui offrant un petit clin d’oeil, puis, il s’incline poliment et s’en va.

Là, pendant une quinzaine de minutes, il parle avec d’autres élèves du conseil, et des professeurs, avant de s’en aller le plus discrètement possible pour rejoindre le banc. Il attend, surveille sa montre nerveusement, jusqu’à la voir revenir vers lui. Sans rien ajouter, il l’attrape et la tire derrière un arbre pour venir l’embrasser intensément. Oh Dieu, que ça le tuait de ne pas pouvoir le faire…. Il sourit, caresse son nez au sien, sa joue du bout de ses doigts, l’embrasse encore, puis prend sa main dans la sienne. « Viens, je vais te montrer un endroit spécial pour moi, personne ne sait que ça existe… On pourra s’y réfugier... » Il l’entraîne avec lui, prends sa voiture jusqu’à un quartier qui semble un peu mal fréquenté. Là, il entre avec elle dans un vieil immeuble et prend l’ascenseur jusqu’au dernier étage. Puis, sortant un trousseau de clés, il ouvre la porte qui mène au toit pour y accéder avec elle. Une petite maison de fortune, faites en taule et matériaux de récupération trône au milieu du toit. Connectant une prise à un mur, il laisse des guirlandes s’allumer devant Lou. « Welcome home... » Parce que ça, c’est la vraie maison pour lui. « Je te donnerai un double, tu pourras venir autant que tu veux, on pourra s’y retrouver à l’abri de tout... » Qu’il dit en venant doucement dans son dos avant de lui caresser un bras avec tendresse.

Savoir que la vie à l’étranger de Hannie lui manque a quelque chose étonnamment réconfortant. Elle est triste pour lui, triste pour eux. Ils ne sont décidément pas à leur place. Et en même temps, dans son esprit germe l’idée qu’ils pourront s’enfuir ensemble. Ailleurs. Construire une nouvelle vie. Une fois que tous les obstacles seront abattus. Cette idée l’enchante tout autant qu’elle la terrifie. Quand son coeur avait-t-il changé à ce point ? Elle qui il y a encore quelques semaines ne jurait que par son mari, excusant ses absences, par amour ? La voilà cherchant un moyen de le quitter, de le fuir, pour partir avec un autre. Un autre qui a débarqué dans sa vie comme un souffle de renouveau, lui ouvrant les yeux sur les mensonges éhontés qu’elle se faisait à elle-même.

Le rendez-vous est posé. Hannie s’éloigne pour rejoindre des camarades de promotion, Lou des collègues. La chaleur de la main du jeune homme lui brûle encore la hanche, une caresse en public, excitante et interdite. Non longtemps après, Hans revient dans le groupe d’enseignant, adressant un sourire complice à Louise. Celle-ci rougit lorsqu’il surprend son regard perdu sur le dos de Hanbin, puis lorsqu’elle le suit des yeux alors qu’il se rend à la sortie, démarrant en quelques sortes le compte à rebours pour elle. Mettre un terme aux discussions en cours le plus vite possible. Lorsqu’elle estime qu’assez de temps est passé, elle commence à annoncer son départ, prétextant un scénario en cours d’écriture. Alors qu’elle se retourne, la voix de Hans l’interpelle.

« Louise ! » Cette dernière se retourne, inquiète. « Oui Hans ? » Elle sent qu’il va dire quelque chose qui ne va pas lui plaire. Finalement il lance. «Tu me feras lire ton scénario ? » Le soulagement est moindre chez Lou. Il s’est abstenu, elle est curieuse, et en même temps, elle ne veut pas savoir ce qu’il a à dire, pas maintenant. Elle prend une expression plus douce. « Avec plaisir Hans. Passe une bonne soirée. » Puis elle s’éclipse. Une fois hors de l’enceinte, elle retire son alliance, la glisse dans une petite pochette de son sac à main, bien à l’abri. Loin de son regard qui lui recherche avec avidité le banc convenu pour le rendez-vous, puis, rapidement les prunelles brûlantes de son amant.

Hanbin l’attend depuis trop longtemps déjà. Son étreinte fait délicieusement frissonner tout l’être de Louise qui se délecte de son toucher, de son odeur, de son baiser qu’elle lui rend avec la même intensité. Des étoiles plein les yeux, elle reprend son souffle, l’écoute. Ses doigts se glissent avec douceur contre ceux du beau brun tandis qu’ils se mettent en marche vers une destination connue de lui seul. « Tant de mystère...j’ai encore plus hâte ! » glisse-t-elle avec malice. Le coeur de Lou bat à toute allure, son sourire en dit long sur l’état dans lequel elle se trouve. Aux côtés de Hannie, elle revit.

Le trajet se fait rapidement, Louise en profite pour détailler le décor extérieur, bien loin de leurs quartiers riches. Elle est étonnée, mais pas inquiète, elle a entièrement confiance en lui. Sans raisons particulières, par intuition. Ils parviennent à un immeuble assez haut. Lou ne s’embarrasse pas à compter les étages, elle observe Hanbin et son air mystérieux. Leurs mains se tiennent, se caressent naturellement, cela apaise Lou. Ils prennent l’ascenseur. Lou se retient de le plaquer contre le mur métallique pour l’embrasser, mais elle y pense. Il dégage quelque chose auquel elle ne résiste pas. Ils parviennent au dernier étage, sur le toit et enfin Lou détache son regard de son bel amant.

« Wow...Comment tu l’as trouvé ? » Hannie a allumé les guirlandes. La petite maison en taule, ressemblant à une cabane de fortune construite pour des enfants. Louise s’avance, observe. Il y a aussi une belle vue sur la ville. Soudain le contact et la voix de Hanbin la font frémir. « Tu es sérieux ? » Elle se tourne vers lui pour lui sourire, glisser sa main contre sa joue et l’embrasser. « C’est un merveilleux endroit. » Simple, pour couper avec toute la richesse inutile dans laquelle ils sont empêtrés le reste du temps. Un endroit pour souffler. « Vivons heureux, vivons cachés... » Elle se hisse à nouveau sur la pointe des pieds pour déposer ses lèvres sur les siennes. Puis elle le regarde amoureusement. « Tu me fais visiter ? »